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Myriam Blal - Content Creator

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Du contenu authentique

Aktualisiert: 10. Dez. 2017

Berlin: 22-24 juillet


-Wieviel für Maniküre und Pediküre?


Mon interlocutrice ne daigne pas lever les yeux de son écran de téléphone portable et montre du doigt une affichette au mur probablement élaboré par un informaticien du dimanche.


On peut y lire en lettres colorées et de tailles diverses et variées:

“Maniküre: 10 euros

Pediküre: 15 euros”


Les prix me paraissant raisonnables, j'acquiesce et elle se met à crier des syllabes à consonance asiatique dans la direction de l'arrière-boutique.


Une réponse se fait entendre et des pas lents et trainants s'approchent. Et soudain, je l'aperçois!


Là, devant moi, se tient le premier homme “esthéticien” que j'ai vu de toute ma petite vie!

Je voudrais lui dire tant de choses: “merci”, “bravo de dépasser les clichés des emplois liés au genre”, “comment ça s'est passé l'arrivée dans ce monde de la beauté?”, “Depuis quand vous faites ce métier?”, etc.


Mais, il me montre déjà le siège massant sans me décrocher un mot ou un regard.


Une fois installée, il commence sa routine pendant que je me fais torturer le dos par les boules massantes intégrées à mon fauteuil.


Les cheveux en pic, le visage ravagé par l'acné, une chaînette dorée autour du cou, une peau imberbe à l'exception d'un poil au menton extrêmement long qu'on a envie d'arracher d'un coup sec, mon esthéticien n'a pas vraiment la dégaine d'un révolutionnaire des normes sociales.


Ses mains s'activent machinalement sur mes pieds pendant qu'il tient une conversation avec sa collègue dans sa langue maternelle s'interrompant uniquement pour me donner directives du bout du doigt.


Je m'ennuie et ma seule distraction est d'essayer de comprendre ce qu'ils se disent. Un challenge compliqué par l'absence totale d'expression sur leur visage. Pas de sourire, pas de froncement de sourcil, pas d'étincelle au fond de l'oeil, rien.


Quand il pense en avoir terminé, il s'éloigne et me montre vaguement une table au fond de la salle. Je devine qu'il s'attend à ce que je le suive. Je m'exécute.


Son téléphone sonne, il prend la communication et commence son travail sur mes mains. Tac, tac, tac. Cuticules, deux trois coup de lime, une coupe rapide des peaux qui dépassent et voilà.


Enfin, j'entend le son de sa voix qui s'adresse à moi, cette fois, pour m’ordonner d'aller me laver les mains.


En revenant, je le fixe droit dans les yeux alors qu'il attaque la pose de vernis sans base et sans top coat, je voudrais juste avoir un échange humain avec la personne qui m'a râpé les peaux mortes de mes talons, est-ce trop demandé?


Mais, il ne me jette qu'un coup d'oeil en biais et retourne à sa conversation téléphonique.


Je me sens comme sur une chaîne de production taylorienne dont je suis le produit et lui, l'ouvrier.


Il m'achève quand il quitte sa place pour aller se loger dans un fauteuil massant pendant que mes ongles sèchent, aucune information sur la durée de mon agonie à venir.


Après sa pause syndicale d’une dizaine de minutes à tapoter sur son clavier, il me fait signe d’aller payer. Je suppose que pour 25 euros, je ne peux pas trop en demander…


Mais par contre, pour les 37 euros que j’ai finalement dû verser sans plus d’explication, ni raison apparente, j’estime qu’un sourire aurait pu être compris dans le service!

-.-

Aktualisiert: 10. Dez. 2017

Bruxelles: 8 - 14 juillet


Sur les toits de Bruxelles, avec une hôtesse française et une compagnie argentino-péruvienne, sirotant une bière belge sur de la musique latine, je m'interroge. En voyant le soleil se coucher derrière les immeubles, je repense aux deux africaines dans le métro qui pestaient contre les chansons espagnoles du guitariste de rue pendant que je souriais à une femme voilée dans le wagon d'en face. À la sortie de la bouche de métro, je manque de trébucher sur le corps inanimé d'un occidental que chacun enjambe sans plus de ménagement.


Dans la capitale de l'Europe, face à une réalité haute en mixité, je me demande ce qu'on essaie au juste de bloquer avec cette terreur sécuritaire? Peut-être simplement, la continuité d'une machine lancée à toute vitesse qu'on appelle le progrès…


La migration, un vaste sujet qui est souvent réduit à l'immigration en Occident en partant du postulat eurocentré que tout le monde veut venir “chez nous”.


Mais, moi, j'ai voyagé au quatre coins du monde et je peux vous dire que j'en ai rencontré à tour de bras des occidentaux immigrés pour des durées indéterminées dans des coins de paradis perdus. Eux, ils ont simplement le droit à un plus joli nom: “les expatriés”. Pas d'angoisse à la douane, pas de situation de précarité, pas de peur du renvoi, juste une envie de voyage, “d'exotisme” et le “bon” passeport.


Peu sont les pays qu'on entendra se plaindre d'être envahis par les occidentaux avec leur mal-bouffe et leur fixette sur l'alcool, les drogues et le sexe. Non, parce que “nous”, on a le droit d'envahir “les autres”. “Nous”, on l'a déjà fait et on se prive toujours pas.


Les adultes occidentaux qui font fleurir le business de la prostitution en Asie, en Afrique et en Amérique latine, ça gêne pas M.Tout-le-monde.


Les étudiants occidentaux qui “vole” le travail des locaux dans les fermes australiennes et néo-zélandaises, non plus.


Les altermondialistes occidentaux qui vont se la couler douce sur les plages paradisiaques et qui travaillent si le coeur leur en dit sans apporter aucune valeur-ajoutée à leur pays d'accueil, ça ne l'intéresse même pas.

Pour ceux qui n'ont pas été présenté, M. Tout-le-monde, c'est un bel homme blanc occidental sportif avec un bon travail à tendance plutôt chrétienne et conservatrice avec un sérieux problème d'égocentrisme.


Les frontières sont des constructions sociales et historiques au même titre que le genre, les continents et les moeurs. Certaines ont été tracées à la règle et d'autres à coup de guerre, mais aujourd'hui on les considère comme légitimes et immuables. Les normes évoluent avec la société. Ce qui était un empire greco-romain est devenu une Union Européenne. Les frontières délimitent des régions culturelles, linguistiques ou institutionnelles, mais l'Histoire nous a appris qu'elles n'ont rien de naturelles.


Et puis, la peur et l'ignorance sont des amies de très mauvais conseil. Comme à l'école primaire, elles racontent des semi-vérités bourrées d'aprioris sur tout le monde et elles essaient de monter chacun contre l'autre.


Elles nous ont déjà souvent fait le coup tout au long de l'Histoire. D'ailleurs, le film “Belle” de Amma Asante m'a rappelé un de leurs nombreux méfaits.


« La situation d'esclave est d'une telle nature qu'elle n'a pu être instituée pour aucune raison morale ou politique, mais uniquement par une loi promulguée, qui reste en vigueur longtemps après que la raison, l'occasion, et les circonstances même où elle a été créée ont disparu de la mémoire. Cette situation est si odieuse que rien ne peut être invoqué pour la soutenir, sinon la loi. Quels que soient les inconvénients qui pourront être la conséquence de ma décision, il m'est impossible de dire que cette situation est permise ou approuvée par la loi de l'Angleterre, et donc ce Noir doit être considéré comme libre.» Lord Mansfield, 1772 dans l'affaire Somersett.


Remplacez “esclave” et “Noir” par “sans papier” et “immigré illégalisé” et vous avez un point de vue tout à fait actuel.


D'ailleurs, je réalise que je suis un vrai melting pot de sujets d'actualités: je suis une jeune, femme, féministe, diplômée, au chômage, suisse-allemande, tunisienne, agnostique, fille d'ex-immigré illégalisé devenu suisse, née d'un mariage d'amour sans divorce et sans conversion religieuse, libre, libérée et appartenant à la génération Y.


Et vous? Qui êtes-vous? Où êtes-vous nés? À partir de combien de générations estimez-vous avoir un droit de possessivité sur une terre? Y vivez-vous pour pouvoir en décider ou votre passeport suffit? Qu'apportez-vous à votre terre? Pensez-vous être les seuls à pouvoir y apporter quelque chose? De quoi avez-vous peur exactement? Qu'est-ce qui vous dérange au juste? Et surtout: pourquoi?


La liberté de circulation sur la planète est-elle un concept à deux vitesses comme la liberté d'expression?


Quand ça arrange le fameux M. Tout-le-monde, c'est un principe fondamental et intrinsèque, mais dès que ça dérange son ego ou ses affaires les exceptions se multiplient.

-.-

Aktualisiert: 10. Dez. 2017

Genève: 12 - 19 avril


-Alors qu'est-ce que ça fait de rentrer? Ça te fait pas trop bizarre?


Je vois dans le regard soutenu de mon interlocuteur qu'il s'attend à une tirade de ma part, mais rien ne sort de plus que :


-Ça va, c'est comme si je n'étais jamais partie…


Une ombre de déception passe sur les yeux écarquillées de mon vis-à-vis.


De toute évidence, il s'attendait à plus de ma part: plus de tristesse, plus de passion, plus de bonheur?


Peut-être juste plus de réaction, mais les jours à Genève passent sur moi comme si de rien n'était.


Je reste une SDF et je vis toujours de mon sac à dos avec quelques autres sacs de shopping en bonus.


Mais j'apprécie le confort relatif du canapé-lit dans mon ancienne chambre, la présence de mon entourage fidèle au poste et le fait que rien n'est inconnu. Genève n'a pas changé, pas vieillis, enfin bref pas bougé.


Elle et moi, on est comme un vieux couple: on se connait trop bien et on peine à se surprendre ou à amener un peu de piquant dans notre histoire d'amour. Elle est ma zone de confort sans risque, mais sans nouveauté excitante non plus.


Quoiqu'il en soit, je souris poliment au 100ème pauvre bougre qui m'a posé l'éternelle question. Un sourire “à la façon de la Joconde”, qui remonte à peine jusqu'au yeux, mais qui semble rempli de choses qui vous échappent.


Je vois quelque chose que tu ne vois pas et ça a la couleur azure des souvenirs…

-.-

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