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  • AutorenbildMyriam Blal

Le retour…

Aktualisiert: 10. Dez. 2017

Zurich : 01 août 2015 - durée indéterminée


Le bus me dépose à l’arrêt au coin de la rue. Il fait grand beau et le quartier semble m’accueillir avec un grand sourire ensoleillé. Presque rien n’a changé : la même Coop faisant face à la même Migros suivi du même magasin Bio et de l’éternel nettoyage à sec dont le logo m’ouvre les bras.


Les bretelles du sac à dos s’enfoncent dans la peau de mes épaules ce qui vient s’ajouter à la douleur des deux sacs en toile que je retiens inlassablement de glisser. Les roues de la valise XXL que je tire à bout de bras grattent le béton dans un grincement agaçant.


J’avais peut-être géré l’organisation de mon 65 litres avec brio pendant mon tour du monde, mais la gestion du déménagement en train est un véritable chaos. Chargée comme un mulet, je multiplie les aller-retour de Genève à Zurich sans structure, ni vision d’ensemble.


Bien que ce ne soit pas la première fois que je revois le quartier depuis mon retour, il me paraît aujourd’hui si petit et si oppressant. Les étages qui me séparent de mon ancien chez moi prennent des airs de marches vers l’échafaud.


Me voilà de retour dans ma prison dorée : celle du confort. Juste un deux pièces maladroitement coupé dans lesquelles je déballe une nouvelle fois ma vie. Plus de recherche de lit pour la nuit, plus de rencontres autour du petit déjeuner, plus de journée remplie d’aventures et de découvertes, voilà, je glisse doucement, mais sûrement dans la piège du “métro-boulot-dodo”.


Enfin surtout “train-pas de boulot-et beaucoup de dodo”…


Les voyages en train me bercent et me donnent l’illusion que je suis encore en mouvement avec, devant moi, la Suisse comme petit monde à (re)découvrir.


La recherche d’emploi me renvoie toujours à la linéarité de mon parcours : Bachelor, Master, stages, premier emploi et voilà! Le coup classique du jeune diplômé avec un peu trop de diplômes et juste pas assez d’expérience. Enfin bref, le serpent qui se mord la queue.


Des idées, des objectifs et des concepts, j’en développe pourtant plusieurs par jour depuis que je suis partie, mais, ici, ils ne semblent plus avoir le goût excitant de génie et d’innovation qu’ils avaient là-bas.


En voyageant, je me suis sentie pousser des ailes et je me savais en train de faire quelque chose d’extraordinaire. Rien n’était impossible, j’étais invincible et l’adrénaline de réaliser mon premier grand rêve me maintenait dans un état de béatitude si grisant.


Je m’étais promise de ne jamais oublier cette sensation et d’en faire mon moteur pour la suite. Il y a encore quelques mois, le monde m’appartenait, alors que assise en face de mon conseiller du chômage, j’ai l’impression de devoir avoir honte de ce dont je suis le plus fière.


Là, où un RH voit un trou dans mon CV, je vois l’année la plus remplie de ma vie : à l’instar de ce que tout le monde peut penser, ce n’était pas des vacances, mais bien un voyage. Les vacances, on les prend pour décompresser, se détendre et respirer un brin d’ailleurs. Un voyage, c’est une aventure vers l’inconnu dont on espère être marqué à vie.


La facilité et la relaxation n’étaient de loin pas tous les jours au rendez-vous comme en témoigne ma flopée de cheveux blancs apparus pendant l’année. Signe d’angoisse ou de maturité, je ne sais pas, mais en tout cas preuve d’un chamboulement.


Même si la façade peut paraître identique, l’intérieur a subi un radical nettoyage de printemps accompagné d’un relooking définitif.


Je n’ai pas fuis le monde du travail, je suis simplement allée jeter un coup d’oeil aux autres réalités.


Et, n’aie pas peur, chère Routine, je suis dorénavant prête à refaire un bout de chemin à tes côtés. Je te promet fidélité et mon sincère dévouement jusqu’à ce que l’ennui nous sépare.


Toutefois, comme dans tout mariage, je ne cesserai jamais de vouloir te façonner à mon image dans le but de finalement trouver un équilibre qui nous convienne à tous les deux…


Amen !

-.-

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